mercredi 29 mai 2013

MAILA GRACIA avance masquée

L'idée d'écrire quelques mots sur le travail "atypique" de Maïla Garcia dormait depuis le début de l'année dans mes carnets. En effet, le hasard (et la nécessite! cachée, sans doute) avait conduit mes pas vers la galerie VIP 66 rue Grignan à Marseille fin d'année 2012. à la découverte d'une œuvre étrange, empreinte d'un chamanisme archaïque ou mieux "primitif" propre - peut-être? - à ses  origines latino-américaine et son enfance passée sur l'ile de la Réunion. En tout cas la beauté des objets présentés était au rendez vous pour dissiper le regard, le détourner d'une certaine banalité.
En fait, les images de l'exposition organisée à l'initiative Jean Cristofol enseignant à  l’École des Beaux-arts d'Aix en Provence, "Nouveaux Regards" en octobre 2010 à l'atelier Cézanne me revenaient elles aussi en mémoire en dehors de toute idée de répétition.
Puis tout récemment, l'association ELSTIR avait sélectionné ses travaux pour sa 29 ème édition Rendez vous des jeunes plasticiens dans  le bel espace Raphaël à Saint-Raphaël (mais c'est bien sûr!)
L'espace Raphaël à St Raphaël
Elle n'a pas reçue de prix , mais l'avenir est devant elle.L'exposition est visible jusqu'au 9 juin.
Une autre lieu accueillait son travail de sculpture à la Galerie Saint Laurent au cœur des Puces des Arnavaux à Marseille parmi les antiquaires, meubles anciens et art contemporain faisant bon ménage en matière de "chine".
Pacific Don Jacques
Après cette mise en place dans le temps,  dans les espaces d'expositions et à travers les associations qui font un travail de promotion de la jeune création, , je glisserai là quelques photos de son travail sur les "masques".
Si l'on se réfère à d'autres articles publiés plus bas, je laisse à penser que moi aussi je suis enclin à vouloir disparaitre, pour avancé masqué, où laisser place à mon double.
Car Maïla aurait fait merveille dans cette exposition sur "les figures du doubles" dont je parle ci dessous : une exposition peut en cacher une autre. 
Un texte de Maïla qui remplace toute analyse de ma part :
  


Le tout est dans la partie qui est dans le tout.

« Quand je parle de complexité, je me réfère au sens latin élémentaire du mot "complexus", "ce qui est tissé ensemble". Les constituants sont différents, mais il faut voir comme dans une tapisserie la figure d’ensemble. Le vrai problème, c’est que nous avons trop bien appris à séparer. Il vaut mieux apprendre à relier. Relier, c’est-à-dire pas seulement établir bout à bout une connexion, mais établir une connexion qui se fasse en boucle. […]  À l’origine de la vie, il s’est créé une sorte de boucle, une sorte de machinerie naturelle qui revient sur elle-même et qui produit des éléments toujours plus divers qui vont créer un être complexe qui sera vivant. Le monde lui-même s’est auto produit de façon très mystérieuse. »[…]

« le tout est plus que la somme des parties », « il existe des qualités émergentes, c'est-à-dire qui naissent de l'organisation d'un tout, et qui peuvent rétroagir sur les parties »,« le tout est également moins que la somme des parties car les parties peuvent avoir des qualités qui sont inhibées par l'organisation de l'ensemble ».

Edgar Morin, La stratégie de reliance pour l’intelligence de la complexité, in Revue Internationale de Systémique

Le monde, comme le corps, peut être vu comme un tout et/ou comme un assemblage de parties.

Chaque membre de ce corps constitue à lui seul un corps autonome, qui obéit à ses propres règles rythmiques, qui utilise son propre vocabulaire, qui organise ses architectures singulières.

Pourtant, un fil semble se tendre dans l’apparent désordre.

On peut penser à la partition qui regroupe les voix de musiciens très distincts et qui jouent dans une même composition.

C'est dans cette dynamique que j'évolue en proposant un espace qui regroupe des éléments apparemment distincts dans leur sujet, leur nature plastique, leur dynamique.

C'est une sorte de musique que je cherche, un air familier dans la rencontre des méduses et de la porcelaine, dans l'érection marine qui rend un hommage païen à la Vierge Noire des Gitans, dans l'attitude du faucon qui scrute son reflet…



Encore, le masque, comme le dit Jean Laude, spécialiste de l'Afrique, ne peut être séparé de ce tout qu'est le contexte social et rituel dans lequel il s'inscrit.

Et le corps devient le "cheval" du masque qui ne peut s'animer que grâce à lui.

Le système qui émerge ainsi, corps/masque, devient une sculpture en mouvement, un assemblage d'énergies qui, le temps de la rencontre, forme un hybride.

C'est précisément le caractère complexe, étroit et ambigu de la relation qu'entretien le corps  avec le masque qui me pousse dans cette direction.

Cette relation me semble avoir des familiarités avec l'expérience sculpturale du monde des formes. Le masque seul est certes une sculpture, mais une sculpture inerte, et même "trahie", selon les termes de Jean Laude.

Cousine Madeleine,Vierge Noire, Dame blanche
Photo de Maïla Garcia portant un heaume fait de (faux) billets de banque:L'argent roi?



Les corps et leur matière, la matière et les corps.

Il y a ici une aventure infinie à éprouver, de lignes, de masses, de textures, de couleurs et de vocabulaire.

Et le mythe peut alors devenir une sculpture comme les autres, comme les symboles qui marchent derrière lui.

L'argent et sa puissance sont aussi des matériaux à sculpter, ils ont un véritable potentiel de sculpture sous leur triste apparence de fétiche contemporain.

Dans la dynamique d’« attraction/répulsion », il me semble voir le reflet de l’Humain.



Ainsi, lorsque le concept, le signe, le symbole, le mythe s'associent au vocabulaire plastique, à la forme, au poids, à la couleur, au rythme, à la courbe, à l'absence et la résistante présence, il se déploie une existence infinie à interpréter.




Faucon

Que dire de plus!
Il me reste à vous souhaiter de croiser son travail et d'en savoir plus, la connaissance d'autrui, dans son cas, est source de richesse.

lundi 27 mai 2013

Une exposition peut en cacher une autre

19 artistes de l'association "Perspectives" viennent, après une sélection rigoureuse,  d'exposer à nouveau leur travaux sur "Les figures du Double" dans l'espace/galerie d'art contemporain 200 RD10, accueillis par Cati et Raymond Galle  à Vauvenargues qui en sont les (heureux) propriétaires.
Si j’emploie le terme habituellement utilisé par la SNCF pour signaler les dangers que peuvent encourir les gens distraits à l'approche des voies ferrées un train pouvant en cacher un autre c'est parce que dans ce cas précis et à l'inverse, il n'y a aucun "danger" à voir  (ou revoir? ) cette exposition dans ce lieu . Et si les trains se ressemblent; si, ici ce sont les mêmes œuvres et non leur double-copie conforme, l'espace d'accrochage, d'un blanc immaculé, vaste et lumineux,  opère comme par magie et transforme la vision globale des travaux.
En ce sens  cette exposition, que nous appréhendions, nous membres du bureau de l'Association et autres artistes,  comme la réplique, la redite, de celle qui avait eu lieu à Bouc-Bel-Air  du 16 au 25 février, n'est absolument pas un clone de la précédente.Les nombreux visiteurs en ce samedi dernier, soir du vernissage peuvent amicalement en attester.
 
Il y a une respiration nouvelle entre les œuvres qui en modifie la perception première pour chacune d’entre elles. Cet accrochage sur les trois niveaux que compte la galerie, incarne étrangement le  paradoxe suivant : le double (de soi ou d'une exposition!) est un autre.
File d'attente pour la lecture des "carnets de dessins de Ninon Anger et Claudette Clarac
 Une judicieuse "interaction" proposée (et nouvelle) dans cet accrochage par ces deux artistes.
Visiteurs attentifs, jeunes et moins jeunes face aux deux œuvres de Pierre Vallauri
Certains ont "discrètement" ajouter une œuvre à cette ensemble. 
 
"Du simple au triple , en passant par le double" ... une œuvre en plus!
A la lecture de l'excellent catalogue publié à cette occasion et vendu  au prix très abordable de 5 €, les plus perspicaces trouveront les intrus.... mais je ne suis pas le seul!

J'ajoute à ces éloges que Gilles Schneider -voix- et Astrid Giorgetta de la compagnie de danse Pica Pica (tient un redoublement !) - ont su admirablement et chaleureusement ponctuer cette soirée.On retrouvera avec plaisir toutes les photos de ces bons moments sur le blog de l'Association :

A voir donc et  sans retenue, dans la Perspectives d'un agréable moment de respiration à la campagne, une bouffée d'art contemporain "modéré" en sus, ,jusqu'au 9 juin du mercredi au dimanche (un dimanche à la campagne...) de 16h à 19h. Les artistes vous accueilleront avec grand plaisir.